ne jamais oublier
En silence nous sommes sortis de la salle.
En silence nous nous sommes assis dans la voiture.
En silence l’asphalte noir a défilé sous nos roues.
En silence nous nous sommes enfoncés dans de subites nappes de brouillard. Nul n’a fait de remarque sur la difficulté de distinguer le bord de la route, sur le risque qu’il y avait de se retrouver dans le décor au premier faux pas.
Nuit et brouillard.
Sur cette route du retour je n’ai pas osé demander si Elle avait aimé le film. Cela me paraissait vraiment incongru. Aimer. Le sujet ne s’y prêtait pas. Et encore tout empreint du poids de l’émotion je ne disposais pas d’une autre manière de poser la question.
Aimer. Alors qu’il n’est question que de la douleur insondable et injuste résultant de la pire barbarie qu’ait connue le siècle écoulé.
Ou alors, aimer, oui peut-être. Puisqu’on est après la BARBARIE, que l’espoir progressivement allume de faibles lueurs dans les regards qui ne pouvaient plus…
Le film est beau, pour ces regards-là, pour les sourires bienveillants, pour la violence dépassée.
Pour ses étranges scènes chorégraphiées. Des scènes au silence lourd, plus éloquent que des paroles.
Un film (un de plus diront certains, mais qu’importe) pour qu’on n’oublie jamais. Même si on est né après les temps terrifiants dont nos parents parlent si peu.
Entretien : 8 lettres dont A D E I L U